Hyper-perméabilité intestinale et hyper-permeabilité psychique ou le cerveau serait-il le 2eme intestin ? Formation Hypnose et Congrès 2007

Dr NADINE DE MALEZIEU
Gastro entérologue et hypnothérapeute, RENNES
Formation en Hypnose
Formation en Hypnose Ericksonienne



Généralités
Métaphore de la piscine
Un patient arrive chez le thérapeute et se plaint que l’eau de sa piscine est trouble.
Sa piscine est alimentée en continu en eau polluée.
Sa piscine est plus ou moins grande et plus ou moins sale.
Il s’épuise à nettoyer sa piscine et n’y arrive plus tout seul et il vient demander l’aide du thérapeute.
Arrivé dans le cabinet, il hésite entre les 3 thérapeutes présents. Il décide de les consulter tous les 3.

Le premier thérapeute compatit à l’impuissance de son patient. Il lui propose de remonter lui-même ses manches et développe une grande énergie à faire la même chose que son patient : il nettoie.

Le 2ème thérapeute, plus économe de sa personne, va fournir des outils de nettoyage au patient : des aspirateurs, des ballets et autant d’outils plus ou moins sophistiqués. Il apprend à son patient à s’en servir.
Le patient est ravi : le travail est plus efficace et l’eau de la piscine est presque claire mais au prix d’efforts constants, d’un contrôle incessant et de stratégies compliquées.

Le 3ème thérapeutique explique au patient qu’avant de nettoyer la piscine en continu, il sera préférable de filtrer l’eau qui alimente la piscine, car cette eau est souillée. Le patient n’aura alors que très peu d’effort à fournir pour maintenir l’eau limpide. Cet effort est dans ses compétences et le patient pourrait même se servir de quelques outils récupérés chez le 2ème thérapeute
Quelle eau alimente cette piscine ? D’où vient-elle ? Pourquoi est-elle souillée ?
Cela n’a aucune importance. Ce qui compte, dit le 3ème thérapeute, c’est de filtrer efficacement cette eau polluée.



La barrière intestinale est une porte d’entrée essentielle dans l’organisme. C’est l’interface entre le monde extérieur et le monde intérieur.
C’est un filtre perméable par nature, car c’est la source de carburant du corps. Ce filtre peut être percé, créant une brèche, une effraction, ce qui permet l’entrée dans l’organisme de particules intruses ou particules oxydantes. Existe-t-il une barrière psychique comparable qui filtre l’information ? Si cette barrière était hyper perméable, quelles en seraient les conséquences ?

Mon propos est une interrogation, une recherche, une piste et je suis loin d’avoir trouvé les réponses.
J’essaye de formuler un concept et transmettre un message clair en me limitant à poser les hypothèses sans chercher de solution. Je vais démontrer que les filtres sont percés. Je ne donne pas de solution pour les réparer.

En médecine chinoise, les aspects physiologiques et psychiques sont dans l’organe et leurs fonctionnements sont indissociables, toujours en étroite interaction. La médecine chinoise nous dit que l’intestin grêle sépare les fractions pures des fractions impures des aliments et autorise l’assimilation des fractions pures. Du point de vue psychologique, l’intestin grêle influence sur la clarté de l’esprit et sur le jugement. Il nous donne un pouvoir de discernement, autrement dit la faculté de percevoir les clartés, les éléments pertinents avant de prendre une décision. L’émotion de l’intestin grêle est la tristesse qui envahit l’individu et nuit à la clarté d’esprit et à la capacité de discernement.


HYPER-PERMEABILITE INTESTINALE DIGESTIVE : HPID
C’est une fuite dans le système de filtration dans la barrière intestinale
La cellule de base de l’intestin grêle s’appelle l’entérocyte. Elle présente une bordure en brosse sur son versant luminal digestif. La surface totale de ses poils est l’équivalent de la surface de 2 courts de tennis.
Le passage des fractions alimentaires vers le monde intérieur se fait normalement par voie transcellulaire soit à travers la cellule. La perméabilité de cette barrière intestinale est assurée par des défenses immunitaires de type IGA, par un mucus, par la polarisation cellulaire et par la jonction entre les entérocytes. Ceux-ci sont solidement attachés entre les eux par des jonctions serrées qui sont des desmosomes.
La dépolarisation cellulaire ou la disjonction des desmosomes va se traduire par une absorption para cellulaire passive : cela correspond à une fuite, le filtre est percé. On observe alors un passage de macro molécules qui vont produire des particules oxydantes, des radicaux libres, des toxines et des réactions antigéniques avec fabrication d’anticorps.
Il y a donc fuite dans la barrière intestinale avec passage direct de particules « intruses » qui entrent dans l’organisme. Elles sont dirigées vers le foie qui est inondé par ces particules intruses. Le foie est saturé et perd sa capacité à tout détoxiquer. Le foie en surcharge de travail produit lui-même des radicaux libres toxiques et une bile toxique car chargée de déchets poisons. La bile oxydative en passant dans l’intestin grêle va aggraver les lésions intestinales et amplifier le phénomène d’HPID.
Il a été aussi dénombré 3 autres phénomènes d’auto-aggavation de l’HPID (allergie, mal nutrition, dysbiose intestinale).

L’HPID est plastique et peut s’amplifier en quelques minutes : par exemple en cas d’une intolérance au gluten, la traversée du gluten à travers la barrière intestinale déclenche un phénomène spectaculaire de disjonction des entérocytes et de dépolarisation cellulaire. L’HPID est alors multipliée par un facteur de 10 au moins.
En résumé, dès que la barrière intestinale est sensibilisée, le phénomène de fuite est très amplifié dès que se présente l’agent sensibilisant.
Les conséquences cliniques de HPID sont majeures car les molécules oxydantes produits dans l’organisme après la pénétration de particules « intruses » sont à l’origine :
de phénomènes inflammatoires,
d’état pré-cancéreux,
de phénomènes dysimmunitaires
du mécanisme de vieillissement
de phénomènes dégénératifs

Les symptômes cliniques de l’HPID sont peu spécifiques : fatigue, malaise, myalgie, arthralgie, fièvre d’origine indéterminée, intolérance alimentaire, douleurs abdominales, distension abdominale, diarrhée, rougeur cutanée, sentiment d’intoxication, déficit cognitif, trouble de mémoire, souffle coupé, faible tolérance à l’exercice physique.

Les maladies associées à HPID sont :
- maladies inflammatoires intestinales
- rhumatisme inflammatoire chronique
- acné, psoriasis, dermatite herpétiforme
- syndrome de l’intestin irritable
- urticaire, eczéma
- déficit immunitaire
- syndrome de fatigue chronique
- hépatite chronique et pancréatite chronique
- syndrome de dysfonction immunologique
- autisme
- hyper activité infantile
- sensibilité alimentaire ou chimique
- alcoolisme
- maladie coeliaque.



HYPER-PERMEABILITE PSYCHIQUE: HPP
Pourquoi imaginer qu’il pourrait exister une HPP ?
La médecine chinoise nous fait suspecter un lien entre la pensée et l’intestin grêle. Certaines expériences et histoires cliniques sont aussi très suggestives . Je vais relater une histoire rapportée sur Internet par la mère d’un enfant de 4 ans.
La grossesse et la naissance de l’enfant se sont très bien passées. Jusqu’à 15 mois, le nourrisson avait un développement tout à fait excellent. A 5 mois, il était assis et à 10 mois il disait déjà 20 mots et à 12 mois il marchait. Il était souriant, facile, jovial, curieux de tout et très actif.
A partir de l’âge de 15 mois, son attitude a commencé à changer radicalement. Il est devenu coléreux, difficile, a commencé à limiter son champ d’activité. Rapidement, il a arrêté de communiquer, ne parlait plus, ne jouait plus, ne s’intéressait plus à rien. Son alimentation est devenue très difficile car il avait une appétence quasi exclusive pour les produits sucrés ou à base de farines. A 3 ans, il restait prostré, ne manifestait plus aucune marque d’attention au monde extérieur ni aucune expression affective. Ses examens neurologiques étaient perturbés avec des anomalies de l’électro-encéphalogramme et de l’IRM. Les tests digestifs montrent une hyper-perméabilité intestinale caractéristique. Le diagnostic posé est un autisme probable
Sur les conseils d’amis et d’associations, la maman décide de mettre son enfant à un régime strict sans sucre ajouté , sans gluten et sans laitage. A l’instauration du régime, les symptômes vont s’aggraver dans le premier mois puis l’amélioration va être très nette. En moins de 1 an, l’enfant a récupéré quasiment toutes ses capacités.
A l’âge de 4 ans, il parle, va à l’école, a récupéré des capacités d’apprentissage, joue avec les autres enfants, s’intéresse à différentes activités, redevient joyeux et câlin. Cependant, après 1 an de ce régime, il garde encore un décalage par rapport aux autres enfants de son âge. Les examens neurologiques qui ont été réitérés se sont normalisés tant au plan des anomalies IRM que l’électro-encéphalogramme. Ses tests de perméabilité intestinale se sont normalisés.
L’hypothèse avancée est que l’hyper-perméabilité intestinale a permis le passage de macromolécules et notamment de certains métabolites de gluten incomplètement dégradés. Ces particules « intruses » agissent à la fois comme un facteur opioïde et d’autres agissent comme des poisons. Ces enfants sont donc drogués et empoisonnés : « l’eau de la piscine est très sale ».

Cette histoire n’est pas unique et elle illustre ce qu’on rencontre en pratique clinique (cependant souvent sous un aspect moins démonstratif).
Alors que serait ce concept d’hyper-perméabilité psychique ? Je préfère parler d’hyper-perméabilité des informations psychiques : HPIP.
Les informations ou événements arrivent au cerveau dans le système hypothalamo-limbique : SHTL sous forme d’encodage. Le STHL, c’est le filtre du cerveau, la barrière. A ce niveau, pour pénétrer dans le cerveau l’information a besoin de subir une transduction. A l’échelle cellulaire une transduction, c’est le mécanisme physiologique qui se passe entre l’arrivée d’une information sur un récepteur de la membrane cellulaire et la transcription de cette information par les noyaux de la cellule. Dans le cerveau la transduction de l’information contenue dans le SHTL correspondrait à l’effet de l’information dans le cerveau : soit l’information intégrée produit une action cérébrale directe, soit l’information est stockée dans une mémoire. Si on reprend le schéma de l’HPID (hyper-perméabilité intestinale digestive), on peut émettre l’hypothèse suivante.
L’HPIP (hyper-perméabilité des informations psychiques) est peut-être un dysfonctionnement de ces transductions : soit les transductions sont dysfonctionnelles, soit certaines informations qui devraient être éliminées franchissent directement la barrière mentale : il s’en suit l’apparition dans la sphère mentale d’informations « intruses » qui ont un rôle oxydatif et toxique.
Les conséquences cliniques peuvent être un effet de ralentissement idéatoire, un déficit cognitif, une perturbation des fonctions mnésiques, un trouble du comportement, une déformation de l’information neuronale vers les organes périphériques. La pensée est comme droguée ou empoisonnée. La pensée s’obscurcit comme polluée, intoxiquée, assombrie ; le milieu cérébral dans lequel évolue l’information devient plus visqueux ;
l’esprit est dans le brouillard « l’eau de la piscine est sale ». La pensée perd de sa clarté et de ses capacités de discernement.
La médecine chinoise aurait-elle raison ? Y-a-t-il une interaction étroite et permanente entre HPID et HPP
(hyper-perméabilité intestinale et hyper-perméabilité psychique) ?

L’hypnose thérapeutique se penche sur ces phénomènes de traitement d’information. Tous ces processus psychobiologiques naturels de transduction de l’information de la mémoire, de l’apprentissage et de comportement sont en étroite relation avec l’état émotionnel du moment. L’état hypnotique est un moment privilégié de contact avec ces processus, car en hypnose ils sont affleurants : ces mécanismes complexes qui convertissent l’information à un niveau mental sont accessibles sous hypnose.
Conclusion
Pour traiter le syndrome d’hyper-perméabilité intestinale digestive : différents champs d’action sont déjà à notre disposition en particulier le traitement de l’équilibre de la flore intestinale ainsi que la micronutrition.
L’hypnose semble être un outil tout à fait adapté pour traiter le syndrome d’hyper-perméabilité psychique.
La métaphore thérapeutique est un support thérapeutique qui parait idéal. Les stratégies thérapeutiques et les constructions métaphoriques qui endécoulent restent à proposer.

Rédigé le 02/12/2008 modifié le 04/12/2008
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