Espace Douleur Douceur. Edito de Gérard OSTERMANN pour la Revue Hypnose et Thérapies Brèves 70.

Quand l’hypnose parle à l’oreille des cigognes.



Michel Dupuet, gynécologue-obstétricien, nous propose une fructueuse illustration clinique de cette thérapeutique incomparable qu’est l’hypnose. Lorsque l’enfant ne paraît pas, tout se bouscule en effet avec son cortège de sentiments négatifs qui s’entretiennent les uns les autres : culpabilité, sentiment d’impuissance, d’injustice, atteinte de l’image de soi et du couple... Flot de colère, déferlement de tristesse, vague de culpabilité viennent nourrir cette tempête intérieure. Les récits de stérilité dans la Bible sont nombreux et la présentent toujours comme un drame, mais pas forcément comme une punition. Nous avons tous autour de nous un couple qui a connu ces problèmes, et qui au bout d’un certain nombre d’années, au moment de recourir à l’adoption, a vu se réaliser la grossesse tant désirée. Des succès ont pu être rencontrés avec d’autres techniques : acupuncture, sophrologie, compléments alimentaires... sans oublier l’inévitable effet placebo.

La stérilité entre conversion et somatisation : psychogenèse et organogenèse du symptôme ne peuvent être opposés. Ils se stimulent l’un l’autre, sans que l’on puisse, pour autant, en faire deux aspects d’un même processus. Si l’angoisse peut avoir un versant psychique et un aspect physique, la stérilité, au contraire, fait intervenir une véritable circularité. L’influence réciproque du psychisme et du corps obéit à la récursivité. On peut donc décrire une boucle récursive dans laquelle les conséquences sont en même temps productrices du processus luimême et où l’effet final est nécessaire à la génération de l’état initial. Michel Dupuet a été le premier surpris de ses résultats des plus prometteurs, tout en affirmant avec modestie qu’il est peutêtre prématuré de penser que les cas d’infertilité décrits et solutionnés par l’hypnose sont la preuve irréfragable de l’action exclusive de cette technique dans les problèmes de fertilité. L’infertilité se révèle être un champ-frontière de la médecine. La non-venue d’un enfant n’est pas une maladie en soi et la reconnaissance d’un ou plusieurs facteurs d’infertilité n’explique pas nécessairement l’impossibilité d’obtenir une grossesse. Le constat est qu’un enfant ne naît pas si facilement de la biologie. Aussi les somaticiens ont intégré le fait que l’on ne peut confondre le désir avec une simple sécrétion chimique et les psys ont renoncé à ne voir dans l’infertilité qu’un refus inconscient d’enfant.

On connaît aujourd’hui l’incidence des événements de la vie émotionnelle sur la fonction de reproduction mais plus aucun profil psychologique de femme ou de couple stérile ne s’impose. Néanmoins le nombre des cas, leur succession, la brièveté des délais entre la séance d’hypnose et le résultat, des cas particulièrement démonstratifs sur un plan iconographique et biochimique sont venus conforter l’auteur dans cette hypothèse. C’est le but de ce travail et des cas qui y sont relatés ; d’autres depuis sont venus enrichir mon expérience, des cas personnels, ceux apportés par le « bouche-à-oreille », les réseaux sociaux. Michel Dupuet espère seulement que dans les mois qui viendront ses confrères gynécologues, les centres de PMA intégreront l’hypnose dans leur panel thérapeutique. Malheureusement la crainte vivace dans l’inconscient médical du détournement de clientèle freine encore la collaboration. Pourtant 4 000 stérilités inexpliquées par an ouvre un vaste champ d’action.


« L’attention est la prière naturelle de l’âme. » Nicolas Malebranche


Muriel Launois, ergothérapeute, nous invite à « Explorer ce qui est bon pour soi ». Dans un monde survolté, où le stress nous fait croire la performance alors qu’il empêche en fait de goûter la vie, Muriel Launois nous propose d’être attentif à nous-même pour redécouvrir la vraie signification de l’écoute et de la communication avec le réel. Elle nous invite à être dans l’ouvert, sensible à ce qui est. C’est une attitude de vie. Il n’y a rien à atteindre, à obtenir, à devenir. Il s’agit simplement de perdre ses prétentions ; tout est déjà là en amont de notre être en-deçà de nos pensées, soucis et émotions. Comme l’écrit William James : « Personne n’a jamais eu une sensation simple en soi : la conscience est une multiplicité grouillante d’objets et de relations. » Vous apprécierez comme moi son paragraphe métaphorique sur les bestioles.

A l’instar de Marc de Smedt, « sachons donc sortir de notre bulle névrotique pour admirer la fascinante nature humaine dans chacune de nos rencontres, en n’oubliant pas qu’il suffit souvent d’un franc sourire, d’un regard clair et d’un dialogue où on laisse de côté l’ego pour décoincer bien des situations relationnelles difficiles ». Solitaire rime avec solidaire, aujourd’hui plus que jamais. Et puis, il est aussi vraiment essentiel de savoir trouver le calme en soi au coeur de la tempête en comprenant que l’on est davantage manipulé par sa propre mécanique mentale que par tout ce qui se passe autour de soi. Il est difficile de parler de cette réalité de transe parce que nous ne sommes plus dans l’espace- temps, donc plus dans le binaire, dans le noir et blanc, le bien et le mal, le ceci ou le cela. Or notre cerveau ne pense que par comparaison et par contraste. « A force de sacrifier l’essentiel à l’urgent, on oublie l’urgence de l’essentiel », nous dit Edgar Morin. Merci à Muriel Launois pour cette approche intégrative.

« Il y a plus de choses qui nous font peur que de choses qui nous font mal. » Sénèque

Véronique Laplane, médecin pédiatre, nous indique la voie pour « Ne plus avoir peur chez le pédiatre ». Lorsqu’un enfant doit se rendre chez le médecin, certaines craintes peuvent surgir. En effet, la peur du médecin est souvent présente chez les enfants. Cette peur peut être due à plusieurs facteurs, tels que leurs expériences passées lors de précédentes visites chez le médecin, la peur des aiguilles ou encore le sentiment d’insécurité. Des techniques telles que l’hypnose peuvent cependant être utilisées pour pallier cette peur et permettre à l’enfant d’aborder sereinement ses rendez-vous chez le médecin. Ainsi un parent sur quatre va reporter un vaccin en raison de la peur de son enfant. Les parents développent différentes stratégies pour aider leurs enfants à se préparer à la visite chez le médecin, cependant, globalement, la consultation reste décrite comme une expérience éprouvante pour les enfants et leurs parents, en particulier lorsque les efforts visant à calmer les jeunes patients vont dominer toute la visite. Les enfants sont d’excellents candidats à l’hypnose ! L’hypnose s’appuie sur l’imagination, or chacun sait qu’en la matière les enfants sont rois ! Pour eux, l’imaginaire est réel du moins jusqu’à un certain âge. Ils sont tour à tour dragon, princesse ou chevalier et ont intacte en eux la magie du « comme si »... Véronique Laplane ne fait que s’appuyer sur cette disposition naturelle avec tact et intelligence relationnelle. En apprenant à comprendre ces processus de manière ludique, les enfants peuvent ainsi mieux appréhender leurs visites chez le médecin et diminuer leur peur. L’hypnose ne doit pas être vue comme une solution magique, mais comme une méthode complémentaire aux techniques de communication, de réassurance et de préparation mentale.

Pr Gérard OSTERMANN

Professeur de thérapeutique, médecine interne, psychothérapeute. Administrateur de la Société française d’alcoologie, responsable du diplôme d’université de Pathologie de l’oralité, Bordeaux 2.

Revue Hypnose & Thérapies Brèves n°70

N°70 : Août / Septembre / Octobre 2023

Voici le sommaire, présenté par Julien Betbèze, rédacteur en chef :

. Anne Malraux décrit, à travers plusieurs séances de thérapie avec Syriane, comment celle-ci va retrouver des ressources, malgré la force du processus dissociatif. Dans cette histoire le personnage invisible du ''dévalorisateur-squatteur'', pilier de la dissociation, devient visible grâce au questionnement externalisant. Il perd son pouvoir et les ressources relationnelles peuvent émerger pour que Syriane retrouve sa fierté et reprenne des initiatives porteuses de sens.

. Cédric Gueguen nous entraîne à « surfer » sur les vagues de la confiance avec les sportifs de haut niveau. Il nous emmène en Polynésie pour saisir la puissance de la mémoire du corps amplifiée par l’entraînement hypnotique.

Sophie Tournouër illustre, à travers la situation clinique de Daniel, l’apport de Guy Ausloos à la compréhension de ''l’acting out'' : le passage à l’acte n’est pas la cause du dysfonctionnement familial, mais une de ses conséquences. Elle nous aide à comprendre le lien entre les différentes compréhensions systémiques des passages à l’acte ; elle met en évidence l’importance de la dynamique de bienveillance et d’une approche collaborative pour retrouver les compétences relationnelles entre la maman et son fils. Et c’est par un questionnement orienté solution que l’apaisement pourra advenir.


Dossier : Indispensable hypnose

. Dominique Megglé nous apprend à repérer et à utiliser les 4 modalités de la transe : transe profonde, légère-moyenne, conversationnelle, invisible. A travers différentes situations cliniques, il souligne notamment comment la relation hypnotique permet d’échapper aux fausses exceptions lorsque celles-ci sont décrites comme de simples moments où les symptômes ont moins d’effet sur les sujets. Comme il le dit : l’hypnose est une jeune fille pleine de promesses.

. Gérald Brassine nous montre comment conduire le travail sur les protections dissociatives chez une femme de 40 ans, avec des antécédents d’abus dans l’enfance, envahie par la peur de sortir de chez elle. Il décrit avec précision une séance qui, grâce a un changement de scénario, permet à cette femme de se libérer d’un syndrome de Stockholm et de retrouver la capacité de faire des choix.

. Stéphane Radoykov et Claude Virot nous rappellent l’importance d’intégrer l’hypnose dans les soins psychiatriques pour que les différents dispositifs thérapeutiques puissent« semer les graines du changement ». Il nous paraît indispensable que, pour le public et les soignants, l’hypnose ne soit pas uniquement associée à l’analgésie, mais soit aussi reconnue socialement comme un processus d’activation du changement en thérapie.

Espace Douleur Douceur

. Gérard Ostermann.
Edito : Quand l’hypnose parle à l’oreille des cigognes

. Michel Dupuet, gynécologue-obstétricien, nous propose une fructueuse illustration clinique de cette thérapeutique incomparable qu’est l’hypnose. Lorsque l’enfant ne paraît pas, tout se bouscule en effet avec son cortège de sentiments négatifs qui s’entretiennent les uns les autres : culpabilité, sentiment d’impuissance, d’injustice, atteinte de l’image de soi et du couple.
. Michel Dupuet a été le premier surpris de ses résultats des plus prometteurs, tout en affirmant avec modestie qu’il est peut-être prématuré de penser que les cas d’infertilité décrits et solutionnés par l’hypnose sont la preuve irréfragable de l’action exclusive de cette technique dans les problèmes de fertilité. Michel Dupuet espère seulement que dans les mois qui viendront ses confrères gynécologues, les centres de PMA intégreront l’hypnose dans leur panel thérapeutique. Malheureusement la crainte vivace dans l’inconscient médical du détournement de clientèle freine encore la collaboration. Pourtant 4 000 stérilités inexpliquées par an ouvre un vaste champ d’action.

. Muriel Launois, ergothérapeute, nous invite à ''Explorer ce qui est bon pour soi''. Dans un monde survolté, où le stress nous fait croire à la performance alors qu’il empêche en fait de goûter la vie, Muriel Launois nous propose d’être attentif à nous-même pour redécouvrir la vraie signification de l’écoute et de la communication avec le réel. Elle nous invite à être dans l’ouvert, sensible à ce qui est. C’est une attitude de vie. Il n’y a rien à atteindre, à obtenir, à devenir. Il s’agit simplement de perdre ses prétentions ; tout est déjà là en amont de notre être en-deçà de nos pensées, soucis et émotions.

. Véronique Laplane, médecin pédiatre, nous indique la voie pour ''Ne plus avoir peur chez le pédiatre''. Les enfants sont d’excellents candidats à l’hypnose ! L’hypnose s’appuie sur l’imagination, or chacun sait qu’en la matière les enfants sont rois ! Pour eux, l’imaginaire est réel du moins jusqu’à un certain âge. Ils sont tour à tour dragon, princesse ou chevalier et ont intacte en eux la magie du « comme si »... L’hypnose ne doit pas être vue comme une solution magique, mais comme une méthode complémentaire aux techniques de communication, de réassurance et de préparation mentale.
Rubriques :

. Stefano Colombo et Mohand Chérif Si Ahmed : Quiproquo « Indispensable »
. Adrian Chaboche : Les champs du possible : ''Vous dansez ?''
. Nicolas d’Inca : Culture monde ''Voyage chamanique au son du tambour''
. Sophie Cohen : Bonjour et après ''Corinne et ses peurs''

Crédit photo: © Patrick Hepner

Rédigé le 02/12/2023 modifié le 02/12/2023
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Ostéopathe, praticienne EMDR-IMO et Hypnothérapeute à Paris et Vincennes. Spécialisée sur les… En savoir plus sur cet auteur


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